L’accès à l’héritage pour les femmes reste limité en milieux ruraux au Sud-Kivu !
23-10-2015 08:20:47
« A Kalonge, une fille de 45 ans est agressée par ses frères qui lui ravissent ses champs héritées depuis la mort de son père seulement parce qu'elle est une fille non mariée» signale un SMS au système Femme au Fone, FAF.
Ces cas d'interdiction aux femmes à hériter des biens laissés par leur père ou mari continuent à se faire vivre dans les coins des territoires du Sud-Kivu. Certaines personnes vivent encore dans l'ignorance des dispositions légales et pensent que seuls les enfants garçons peuvent hériter des biens laissés par le père décédé.
Cependant il y a les femmes qui se battent pour pouvoir accéder à l'héritage au même titre que l'homme. « Même si c'est un petit nombre, certaines femmes ont compris qu'elles ont le droit à l'héritage et qu'elles doivent se battre pour l'arracher. Je connais aujourd'hui les femmes qui ont hérité des champs, vaches, chèvres et certaines des maisons parce qu'elles ont compris qu'un droit s'arrache mais ne se donne pas en cadeau. C'est un long processus mais les femmes finiront par jouir de leurs droits autant que les hommes surtout en famille» explique Mariette Mwesha de l'Association des Femmes des Médias, AFEM.
« Quand mon père est décédé, il nous a laissé à 9 filles dans ma famille. Je suis la fille ainée, après l'enterrement comme je n'étais pas dans mon village, on m'a dit que c'est le fils de mon oncle paternel qui a hérité ; alors j'ai demandé pourquoi lui a hérité à ma place. Mon oncle m'a dit que mon père a laissé des filles et non des enfants garçons capables d'hériter. A ce jour j'ai introduit une action en justice et je le suis de près », témoigne Agnès MBONEKUBE, habitante de Kamanyola.
En milieu rural au Sud-Kivu comme dans d'autres provinces de la RDCongo, la majeure partie des ressources est constitué de la terre. C'est un moyen indispensable pour la survie et le bien être des communautés. Malheureusement le nombre des femmes qui y accèdent comme propriétaires est limité car certaines coutumes rétrogrades démontrent que la femme doit dépendre de tout de l'homme. Si celui-ci décède, l'accès de la femme à l'héritage demeure encore limité. Dans certaines familles, c'est tout un problème si la femme n'a pas mis au monde un enfant de sexe masculin, si elle a accouché des enfants filles, les discussions sont parfois houleuses pour laisser la place à la fille pour l'héritage.
« Nous avons sensibilisés les mois passés les habitants dans quelques coins des territoires de Kabare et Walungu sur l'importance à accorder l'accès des femmes à l'héritage et à la terre pour une bonne sécurité économique et physique des femmes », fait savoir maitre Ghislaine NAWEZA de l'association des femmes avocates du Sud-Kivu.
Cette semaine, deux hommes en provenance du territoire de Walungu sont arrivés à la rédaction de Femme au Fone pour solliciter l'aide de FAF pour une femme de leur groupement qui est menacée par les enfants de son beau-frère car elle a mis au monde seulement des enfants filles. En effet, Césarine M'Chibambo a mis au monde 9 filles et la famille de son beau-frère lui menace qu'elle et ces filles n'ont pas le droit d'hériter au moment où son défunt mari a laissé le testament au nom de ces enfants et de sa femme. Femme au Fone a confié ce dossier à la clinique juridique de l'organisation SOS IJM de Walungu, qui a promis de bien défendre les droits de cette femme. D'ailleurs depuis que SOS IJM suit cette affaire, le monsieur qui menaçait Césarine M'Chibambo a pris fuite.
« Moi je pense que l'exclusion des femmes à l'héritage fait partie des violences économiques, c'est nécessaire que les dispositions légales soient respectées et connues de tous pour permettre aux femmes d'être associées à la succession, même en milieux ruraux » souligne Jean Moreau TUBIBU défenseur de droits de l'Homme à Bukavu.
Le code de la famille de la RD Congo à son chapitre consacré aux successions, l'article 758 reconnait l'héritage à tous les enfants filles et garçons sans distinction de sexe.
Eliane POLEPOLE