La pauvreté et la non gratuité de l’école mettent en danger la sécurité des filles

05-09-2014 13:15:35

Maombi a 12 ans, elle habite Muku situé à plus de 15 kilomètres de Bukavu. Pendant toute la période de vacances elle vient vendre les oignons en ville pour pouvoir se payer les cahiers et d'autres fournitures scolaires pour la rentrée scolaire, prévue pour le 8 septembre 2014. Cette jeune fille, élève à l'école primaire affirme « je n'ai pas eu le temps de me reposer et profiter de mes vacances ». Cette élève qui n'a pas bénéficié de ces vacances est ce qu'elle saura bien se tenir en classe et réussir aux cours comme il faut ? Quel rendement cette situation peut avoir sur son éducation scolaire ?

Le cas de Maombi n'est pas différent de plusieurs autres enfants qui sont obligés de travailler pendant toute la période des vacances pour préparer la rentrée scolaire. Les contraintes de la vie et la pauvreté dans leurs familles les poussent à exercer le petit commerce pour aider leurs parents tant soi peu à satisfaire leurs besoins.

Des messages reçus au système Femme Au Fone les confirment aussi : « Les jeunes filles dont l'âge varie entre 6 et 12 ans parcourent des kilomètres en transportant des lourds fardeaux constitués des cannes à sucre et des bananes. Elles cherchent de l'argent pour les fournitures scolaires», indique un message en provenance du territoire d'Idjwi. Cette situation met aussi la femme dans une situation d'insécurité.

Roger Matabaro enseignant à Bukavu et président du Syndicat des Enseignants du Congo section du Sud-Kivu SYECO souligne que « la jeune fille habituée à toucher l'argent pendant les vacances ne sera pas concentrer aux études car elle pourra être en classe tout en pensant à ce qu'elle faisait pendant les vacances et au bénéfice qu'elle encaissait ».

« J'ai 13 ans, j'habite à Karale, pendant cette période des vacances je vends les œufs, je circule partout avec mon petit panier en ville. C'est ma mère qui m'a donné cet argent pour faire cette activité, avec un bénéfice de 800FC par jour, à la fin des vacances je vais me payer les cahiers, l'uniforme et les souliers pour la rentrée scolaire, pendant les cours je ne vends pas» témoigne Bienfait au micro de Femme Fone.

Christian Barungu membre de l'association des parents d'élèves de Bukavu fait savoir que cette situation se manifeste plus pendant les vacances car les parents sont incapables de satisfaire aux besoins de leurs enfants car l'argent que certains gagnent est insuffisant, d'autres n'ont pas du travail ou ils travaillent mais ils sont dans l'incertitude d'avoir leur salaire à la fin du mois.« Lorsque ça tourne mal, c'est la femme qui est la première victime. Une petite jeune fille qui est partie vendre à plus de 10 kilomètre de sa maison, à 20heures si elle n'est pas encore là, c'est la femme qui subit les injures de son mari et même de son entourage » ajoute Christian Barungu.

Cette situation met aussi ces enfants en danger, ils ne sont pas contrôlés, risque des accidents de circulation routière, d'avoir des mauvaises habitudes de la rue, le vol, certaines filles en revenant à des heures tardives courent beaucoup de risque d'insécurités ; elles sont parfois violentées par les bandits de chemins et d'autres peuvent être victime de viol ou d'enlèvement etc.

Josephine Mugisho de l'association locale « Peace Camping » qui œuvre pour la défense des droits de enfants à Bukavu se dit elle très choquée de voir que les enfants sont obligés de travailler pendant les vacances pour subvenir à leur propre besoins, elle estime que « l'Etat Congolais doit garantir la gratuité de l'école primaire comme s'est dit dans la constitution et permettre aux enfants de sentir que leurs droits sont respectés».

Pour sa part, Roger Matabaro recommande « à l'Etat congolais d'améliorer le salaire des parents agents fonctionnaires de l'Etat, de supprimer la prime et de faire respecter les droits des enfants. Selon, lui c'est une perte si les jeunes filles ne sont pas bien encadrées pendant les vacances, elles risquent même de tomber enceinte par manque d'un suivi adéquat. A chacun de prendre ses responsabilités, aux parents et aux autorités, précise-il».

Notons que la convention relative aux droits de l'enfant des nations Unies à son article 31 stipule que « les enfants ont besoin de loisirs, le repos, le temps libre et les jeux sont importants dans la vie de chaque enfant» et l'article 32 de la même convention renchérit pour les enfants qui travaillent que «Dans beaucoup de pays, les enfants passent le plus clair de leur temps à gagner de l'argent pour que leur famille puisse survivre. Ces enfants n'ont ni le temps de jouer, ni le temps d'apprendre. La Convention entend protéger tous les enfants contre l'exploitation et contre le travail qui nuit à leur santé. Dans ce cas, protéger signifie: les gouvernements des différents pays élaborent ou adoptent des lois dans lesquelles ils fixent l'âge à partir duquel les enfants sont autorisés à travailler, le nombre d'heures par jour et le salaire minimum que le patron doit leur payer ».

Les enfants filles et garçons ont donc besoin d'être bien encadrées pendant la période des vacances et même tout au long de l'année scolaire car leur éducation et leur épanouissement en dépend. C'est nécessaire que les jeunes filles accèdent à l'éducation car ce sont elles les responsables de demain, si elles ne sont pas instruites, elles ne seront pas en mesure de participer à la gestion de la chose publique.

Eliane POLEPOLE

Journaliste Femme au Fone Sud-Kivu