L'héritage est un problème majeur pour la sécurité de la femme
"Ces pratiques maintiennent les femmes dans une situation de pauvreté et de vulnérabilité"
22-05-2014 08:59:02
''Lors du décès d'un père de famille, la femme n'as pas droit d'hériter d'une parcelle, d'un champ, d'une voiture, et même de réclamer l'argent que l'on devait à son mari de son vivant quel que soit le montant. Par contre elle à droit à un sac de manioc, des assiettes, d'une houe, des pagnes si c'est une jeune fille ''. C'est le contenu d'un message envoyé au système de Femme-Au Fone en provenance de Sange dans le territoire d'Uvira.
Depuis plus d'un siècle maintenant, les us et coutumes ne donnent pas à la femme accès à l'héritage. Plutôt, ils la discriminent et la prend pour un être inférieur par rapport à l'homme. Après la mort du mari ou d'un père, certaines femmes et filles sont extorquées de leurs biens, d'autres n'ont pas le droit de réclamer leur part de l'héritage. ''Malgré l'apport significatif des femmes aux revenus familiales et à la croissance économique ; surtout dans les zones rurales la société ne semble toujours pas donner à la femme sa valeur en tant qu'être humain dont on reconnait des droits'' souligne Julienne Baseke, sociologue.
Au Sud-Kivu certaines organisations locales, nationales et internationales ont mené des études sur la question d'héritage. Selon une étude menée par APC (Action pour la Paix et la Concorde) à Kalehe en 2012-2013, ''il existe plusieurs interdits à l'égard de la femme qui sont, entre autres, le fait de détenir la terre, d'hériter du pouvoir coutumier, de participer à des réunions avec les hommes, etc. cette étude, montre en plus que le non respect de ces pratiques entrainerait une malédiction''. '' Vous allez réaliser que ces pratiques maintiennent les femmes dans une situation de pauvreté et de vulnérabilité. Cela se justifie par le fait que l'on prive souvent la femme des choses de grande valeur qui peuvent assurer sa survie comme la terre, la parcelle, le pâturage, les bétails après la mort du mari ou d'un père'', souligne Jocelyne Matabaro, chargée de programme à l'IFDP (Innovation et Formation pour le Développement et la paix).
De coutumes rétrogrades au changement positif
Certains chefs coutumiers estiment qu'il n'existe pas de discrimination aussi longtemps que l'on veut protéger les biens de la famille.
'' C'est une perte lorsqu'une femme bénéficie de l'héritage et que par après, elle s'en va fonder une famille qui va profiter de cet héritage '' insiste le mwami Nabagoye III au micro de Femme au Fone. '' La marginalisation dont on parle à l'égard des femmes ne peut être confirmée car en lui refusant l'héritage c'est bien au profit de la famille'', poursuit-il.
Pourtant devant la loi, les hommes et les femmes sont tous égaux. Les us et coutumes contraires à la loi devraient être bannis. ''La loi ne dit pas que les femmes auront peu et que les hommes plus en terme d'héritage, à quoi bon continuer avec ces pratiques qui n'acceptent toujours pas la femme comme être humain qui possède des droits au même pied d'égalité que l'homme ? », S'interroge maitre Moise Bashwira. « Nous devons préciser les choses au sens que même si l'homme meurt, et que son testament est discriminatoire à l'égard de la femme et la jeune fille, la loi a le pouvoir de la modifier au profit de tous les héritiers ».
Certaines organisations qui travaillent pour la défense des droits humains et les questions d'héritage ont montré que pour les années passées, les problèmes d'héritage chez la femme concernaient plus la terre. Mais actuellement, avec les sensibilisations régulières dans les milieux ruraux, près de 40% de cas ont été résolu. '' Il faudrait encore sensibiliser davantage la population et surtout les leaders locaux, les gardiens des coutumes car beaucoup de femmes ne parviennent toujours pas à hériter'', conclue Jocelyne Matabaro. ''Les femmes devraient aussi exiger le mariage civil pour qu'elles soient protégées par la loi en matière d'héritage''. Poursuit-elle.
Maguy Buhendwa, Femme Au Fone