Bukavu : Le choc entre la sécurité économique et physique des femmes vendeuses le long des artères de la ville.

18-08-2017 11:12:47

Au Sud Kivu, depuis plusieurs décennies, la situation socioéconomique des populations, ne fait que se dégrader de plus en plus. Les différentes guerres qu'a connue cette province et les différentes poches d'insécurité qui persistent dans certains territoires n'ont fait que détruire les tissus économiques, et ont ramené des milieux des personnes à quitter les territoires pour venir s'amasser dans la ville de Bukavu. Un exode rural sans précèdent qui a été à l'origine de la poussée des nouveaux quartiers dans la ville de Bukavu.

Aux fonctionnaires de l'état avec des salaires insuffisants et irrégulièrement perçus, s'ajoute une masse des hommes et des femmes sans travail, sans occupation. Les conditions de vie des familles ne font que se détériorer de manière que le choix le plus facile est de réunir des petits fonds pour une activité génératrice de revenus. Elles vont être des milieux des femmes qui vont se livrer à des petits commerces.

Le boum des femmes petites commerçantes

Etant constituait de trois communes, la ville de Bukavu comprend trois grands marchés repartis dans les trois communes.

Il s'agit du marché central de Kadutu situé dans la commune portant le même nom, du marché de Nyawera dans la commune d'Ibanda et du marché central de Bagira. A ces grands marchés s'ajoutent d'autres petits marchés, le marché dite beach Muhanzi, le marché Feu rouge, marché de Nguba, marché Bashomere. Malgré la croissance de la demande des étalages, les structures de ces bâtiments sont restées les mêmes. La majorité de ces marchés construit depuis des décennies, ont gardé leurs capacités d'accueil et paraissent insuffisant par rapport au grand nombre élevé des personnes exerçants les activités commerciales.

Ces grands groupes des demandeurs des places d'étalage, constituées en majorité des femmes n'ont d'autres choix que soit des déambuler le long des journées, soit d'exercer leurs activités autour de ces marchés cités ci haut, ou soit encore, exercés directement sur les artères et voies publiques.

Le seul exemple de la commune d'Ibanda, nous envoie devant les bureaux de la Société Internationale d'Electricité des pays des Grands Lacs SINELAC en sigle, sur avenue Vamaro, aux alentours des bureaux de la 33ème Région militaire sur avenue Kasongo, derrière le marché de Nyawera, sur la route allant vers le camp militaire dit camp SAIO, pour ne citer que ces endroits.

A ces endroits, les femmes étalent leurs marchandises à la recherche du pain quotidien et la survie de leurs familles, d'où la présence des marchés dits pirate. A travers ces petites activités économiques, elles subviennent aux besoins quotidiens de la famille, entre autres, la scolarisent des enfants, les nourrissent et les vêtissent. Elles répondent aussi à leurs propres besoins primaires.

Parmi les articles vendus par ces femmes, des tomates, légumes, poissons, farines, oignons, viandes et autres.

Ce sont des marchés non reconnu par les autorités urbaines et comportant pour la plupart des femmes aux petits capitaux, des vendeuses occasionnelles ou n'ayant pas assez de moyen pour se payer une table dans le marché officiel.

Je suis vendeuse des tomates et j'ai un capital de 5000FC, alors que la table coute cinq dollars américains, je passe la journée à tourner devant le marché de Nyawera et voir si je vais vendre quelques choses, que faire?

D'autres justifient cela par l'étroitesse des marchés, cas du marché de Nyawera, renseignent certaines femmes rencontrés à ce marché.

Les difficultés auxquelles font face les femmes vendeuses le long des artères de la ville de Bukavu.

Ces femmes sont butées à des nombreuses difficultés et subissent des tracasseries policières à ces marchés.

Elles sont soumises à de nombreuses taxes sans quittance et sont victimes de l'insécurité perpétrée par les enfants de rue.

Parmi les difficultés, les femmes se voient ravir par force leurs marchandises et pourchassées par les éléments de l'ordre, comme l'indique cette femme rencontrée à Nyawera.

J'avais un bassin des poissons, d'un coup les policiers arrivent, les ravi et partent avec. Parfois ils se partagent nos marchandises ou nous les remettent après avoir payé une somme d'argent.

Ils utilisent la force, jusqu'à déchirer nos habits et nous tabassent, renseigne une femme de Panzi qui a envoyé son message dans le système femme au fone.

Pour la coordonnatrice de RFDP, Vénantie BISIMWA, cette situation perdure car elle ne touche pas les autorités étant donné que plusieurs fois différentes organisations féminines constituées en commission se sont mises ensemble pour montrer aux autorités concernées, différentes difficultés auxquelles font face ces femmes afin de prendre des mesures adéquates, mais aucune solution pratique n'est apportée, la situation reste comme telle.

De son coté, Maitre Jean de Dieu MULIKUZA pense que les autorités compétentes devraient prendre des dispositions pratiques aux regards des dispositions de l'ordonnance loi N079/021 du 02 Aout 1979 portant règlementation du petit commerce à son article 2qui autorise le commerce de toutes denrées, marchandises ou objets de consommation courante soit au domicile même du vendeur, soit de porte en porte ou de place en place, soit encore sur la voie publique ou sur les marchés publics .

Cette loi qui reste en application, a remplacé le décret-loi du 2 avril 1957 relatif au commerce ambulant ainsi que d'autres dispositions contraires à cette Ordonnance-loi ont été abrogés.

Les propos du Maitre Jean de Dieu sont réfutés par un membre du bureau d'étude à la mairie de Bukavu, Jerry Blaise RUDEGEMBIA. Pour lui, la mairie à travers son service chargé de l'assainissement de la ville se doit de chasser les femmes sur les voies publiques pour des raisons de salubrité de la ville, également pour garantir la sécurité de ces vendeuses qui courent des risques des accidents.

Elargir les marchés existants et créer d'autres dans les quartiers à forte compacité des populations

Au regard de la situation d'extrême pauvreté que vivent les familles congolaise en général et en particulier celles sud kivutienne aujourd'hui, il n'est plus à démontrer l'impact de ces activités que mènent ces milieux des femmes pour répondre aux besoins élémentaires de leurs familles. Ces femmes sont devenues les socles économiques sur lesquels repose la survie de leurs familles.

De ce fait, face à cette situation qu'elles vivent au quotidien, accrochage permanente avec les éléments de la police, risque imminent des accidents des circulations routières, les intempéries, les poussières, les vols ; les autorités urbaines se doivent de trouver des solutions palliatives au lieu de traquer ces femmes le long des journées, et surtout que nombreuses confirment qu'elles sont appelés de payer des taxes d'étalage, malgré les débandades dans lesquelles elles sont soumises à longueur des journées.

Madame Vénantie BISIMWA et le président du comité syndical du marché de Nyawera, Fabien BINJA recommandent que les constructions des différents marchés de la ville et des différents territoires soient revisités et que d'autres capables d'accueillir un grand nombre des vendeurs soient érigés.

Selon l'autorité urbaine, pour les cas du marché de Nyawera, un projet de réhabilitation financé par la banque Mondiale à hauteur de 80 000 000 de dollars avec une capacité suffisante d'accueil est en cours.

Isabelle Riba Kazingufu